La Minerve: patriote, modérée, conservatrice

La Minerve en 1826. BAnQ
Le journal La Minerve est fondé à Montréal par Augustin-Norbert Morin, un étudiant de 23 ans. Son objectif est de remplacer Le Canadien pour défendre les idées du parti patriote. Un prospectus est lancé le 14 octobre 1826 et le premier numéro est publié le 9 novembre suivant. Morin est alors le directeur politique du journal, tandis que John Jones en est l'imprimeur. La Minerve utilise les presses de l'imprimerie de Dominique Bernard, propriétaire du Canadian Spectator, journal patriote de langue anglaise.  Le journal connait rapidement des difficultés financières et le 27 novembre, on en suspend déjà l'impression. Il avait alors quelques 240 abonnés. 


Duvernay par Notman. Musée McCord

Ludger Duvernay achète La Minerve le 18 janvier 1827. Morin en demeure le rédacteur et le directeur politique et Duvernay participe à la direction et imprime le journal. On profite de la relance, le 12 février, pour recommencer la tomaison, comme s'il s'agissait d'une nouvelle feuille.

Ludger Duvernay, qui sera un des fondateurs de la Société Saint-Jean-Baptiste, fait de La Minerve la voix du mouvement patriote et l'un des journaux les plus lus de cette époque. Le journal peut compter en 1832 sur environ 1300 abonnés, et est régulièrement cité sur la place publique et au parlement. On trouve parmi ses collaborateurs Denis-Benjamin Viger, Louis-Hippolyte La Fontaine et Louis-Joseph Papineau, bien que les articles de soient pas signés et que le directeur assume toutes les conséquences du contenu publié. 
 
Le Duvernay de cette époque est fougueux et n'hésite pas à interpeller personnellement ses ennemis politiques. En plus de démêlés avec la justice, cette impétuosité le mènera jusqu'au duel en 1936, contre Clément-Charles Sabrevois de Bleury, cofondateur du journal Le Populaire et député de Richelieu.

La Minerve en 1835. BAnQ
Ludger Duvernay est arrêté une première fois pour diffamation en 1828. En 1833, le clergé appelle au boycott de La Minerve. Duvernay est emprisonné une seconde fois en 1832 pour libelle diffamatoire, en compagnie de Daniel Tracey, rédacteur du Vindicator. En septembre 1836 il fait un autre séjour en prison pour outrage au tribunal.  En novembre 1837, le gouverneur Gosford émet des mandats d’arrestation contre 26 leaders patriotes, dont Duvernay. ce dernier s'enfuit aux États-Unis et un seul numéro de La Minerve paraîtra après son départ. 




Retour d'exil: de modéré à conservateur

Ludger Duvernay revient d'exil en 1842. Il ressuscite son journal à l'invitation du modéré Louis-Hyppolite Lafontaine, qui a besoin d'un organe de presse pour soutenir son Parti réformiste, qui revendique notamment la responsabilité ministérielle. Le journal deviendra l'adversaire des idées plus radicales des Rouges, exprimées dans les journaux L'Avenir et Le Pays.

À partir de 1854, La Minerve et son propriétaire défendent l'Alliance libérale-conservatrice de George-Étienne Cartier et de John A. Macdonald qui remplace les Réformistes à la tête du Canada-Uni.

L'après Duvernay: Confédération et conservatisme


Ludger Duvernay meurt en 1858 et La Minerve devient la propriété de Duvernay et Frères (Napoléon et Denis). En 1879, ils vendent à Clément-Arthur Dansereau, copropriétaire depuis 1870. Dansereau revend le journal pour la somme de 38 000 dollars à la Compagnie d'imprimerie de La Minerve, organisée par l'homme politique Joseph-Charles Taché.

La Minerve en 1895. BAnQ
À partir de 1889 les propriétaires se succèdent:
1889: Trefflé Berthiaume
1891: Sénécal, Poitras et Cie.
1892: Eusèbe Sénécal 
1898: Compagnie du journal Le Monde
Après une suspension en 1897 en raison de difficultés financières, le journal est brièvement relancé en 1898. Mais ce journal d'opinion est incapable de s'adapter aux nouvelles boulversements que vit la presse écrite et subit le contrecoup de l'arrivée au pouvoir des Libéraux de Laurier. La Minerve ferme définitivement ses portes le 27 mai 1899.

Malgré tous ces changements de propriétés, La Minerve est demeurée fidèle aux Conservateurs, soutenant les idées de George-Étienne Cartier puis de Joseph-Adolphe Chapleau. Elle a défendu le projet de Confédération, les chemins de fer et le protectionnisme. 

Principales sources:
  • André Beaulieu et Jean Hamelin, La presse québécoise des origines à nos jours.
  • Collection numérique de BAnQ.
  • Le dictionnaire biographique du Canada.
  • L’encyclopédie canadienne.




 

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